La Famille Titeca
D’aucuns prétendent que les Titeca sont arrivés dans le Nord des Pays-Bas Espagnols dans le sillage du troisième Duc d’Albe, au XVIe siècle.
Ils sont en tous cas nombreux dans le Nord de la France et à la côte belge et c’est dans la région d’Ypres que s’installent les premiers membres identifiés de notre branche familiale.
Le premier médecin de la famille, Gustave Titeca (1843-1892), entre à 20 ans dans le Service de Santé de l’Armée en qualité d’élève-médecin et fait ses études de Médecine à l’Université de Gand. Diplômé en 1869, il est l’un des premiers Belges à collaborer avec Louis Pasteur à Paris ; il s’illustre principalement par son combat pour la vaccination obligatoire contre la variole en Belgique. Membre correspondant de l’Académie Royale de Médecine, il meurt jeune, à 48 ans, d’une pneumonie, laissant deux enfants, dont Raoul Titeca, âgé alors de 14 ans.
Dès l’âge de sept ans, en 1885, Raoul (Charles Raphaël) Titeca (1878-1967), son fils, se retrouve en pension chez les Jésuites à Namur, à Gand puis à Dijon, au Collège Saint-François de Sales d’où il est retiré en décembre 1892, au décès de son père.
Déstabilisé, il échoue à l’Institut Saint-Louis et est orienté vers des études de menuiserie.
« Tout le monde n’est pas fait pour les études », lui explique son tuteur.
Piqué au vif, il se présente alors au Directeur de l’Institut Robert, s’engageant à réussir et à rembourser son minerval « plus tard », dès qu’il le pourrait. Tenant sa promesse, il réussit ses études gréco-latines et s’engage comme son père dans la carrière militaire après avoir été admis, dès le premier essai, à l’Ecole Militaire, et ensuite à l’Ecole de Guerre.
Alors que sa voie semble toute tracée, il quitte soudainement l’Armée en 1908 à l’âge de 29 ans, alors marié et père de famille, sans aucune expérience dans le domaine de la santé, pour se consacrer à l’administration d’un petit asile d’aliénés, situé Chaussée de Louvain au n° 411, la « Maison de Santé Maeck », propriété de l’oncle de son épouse, désireux de se retirer.
L’année suivante, en 1909, il loue une propriété à Jette pour y installer une section psychiatrique ouverte, le « Sanatorium Sans Souci ».
Sa fonction de Directeur administratif ne lui permettant pas de donner aux institutions l’impulsion du développement qu’il ambitionne, il s’inscrit à la Faculté de Médecine à l’Université Libre de Bruxelles (ULB) à l’âge de 33 ans, en 1911.
La Guerre 1914-1918 le remobilise et le plonge dans la bataille de l’Yser, au sein d’une colonne de blindés qui s’illustre à Ramskapelle, sur la terre de ses ancêtres. Il terminera la guerre comme Major dans la Division de Cavalerie du Général de Witte de Haelen.
Démobilisé en 1918, il reprend ses études, bouclées en cinq ans au lieu de sept, et se consacre simultanément au développement de la Maison de santé Maeck qui porte sa capacité d’accueil de 40 à 450 lits et accueille annuellement 1.500 nouveaux malades, au lieu de deux par an précédemment, et du Sanatorium Sans Souci qui compte huit lits au début et 145 actuellement, avec quelque 400 admissions par an !
Élu Président de la Société Royale de Médecine Mentale en 1930, il milite pour la création des services dits « ouverts », où les patients peuvent se faire soigner librement. Cette initiative se transforme en combat lorsque la Magistrature, à coup de descentes tonitruantes du Parquet, s’acharne à y chercher des cas d’enfermement abusif et de spoliation de biens, en pure perte évidemment.
De ses trois enfants Jean, André et Denise, l’histoire fait la place belle à l’aîné.
Jean TITECA (1905-1988) est d’abord un brillant étudiant en médecine, rare parmi ceux qui ont obtenu 22/20 à leur examen d’anatomie. Sa vie et son œuvre ont été magistralement rapportées dans l’hommage que lui rend le Professeur Charles Mertens de Wilmars le 26 novembre 1988 à l’Académie Royale de Médecine, dont Jean Titeca avait été élu Président en 1972. Pionnier de l’électroencéphalographie, il accumule durant sa carrière tous les honneurs et laisse derrière lui plus de 300 publications scientifiques !
André Titeca (1908-1989) n’aimait pas les grands éclairages et ce n’est que lui rendre justice que de lui restituer un peu de tout ce que nous lui devons. Piètre étudiant durant ses études secondaires à l’Athénée d’Ixelles, il couple ensuite des études d’Ingénieur commercial à l’Ecole de Commerce Solvay avec celles de Médecine, et ce simultanément ! Grâce à cette double compétence, il assure la pérennité des institutions familiales tout en garantissant la primauté de la dimension humaine et médicale sur les inévitables considérations commerciales. On se rappellera son séjour en Suisse, chez le professeur Muller, pour s’initier aux cures de Sakel, premier traitement porteur d’espoir pour les patients atteints de schizophrénie, qu’il introduit ensuite dans nos cliniques. C’est aussi lui qui est aux commandes des traitements miraculeux par électrochocs, pendant la Deuxième Guerre Mondiale, sur une machine introduite de France « en contrebande ». C’est également lui qui est momentanément déchu de son droit d’exercer la médecine parce qu’il couvre la responsabilité d’une évasion d’un patient sous régime de la collocation, sorti boire un verre avec le Directeur !
Comme son père, il s’en tient, sur le plan médical, à une approche essentiellement biomédicale pragmatique qu’il complète par un bon sens thérapeutique très apprécié des patients et de leur famille.
Raoul (Jean Paul) Titeca (1941), fils d’André, psychiatre et titulaire d’un DES en neurologie, assistant de 1967 à 1972 au Service de Psychiatrie de l’Hôpital Brugmann, reprend la Direction Médicale de la Clinique Sans Souci, secondé par la Directrice Laurence Fetu, ingénieure diplômée de l’Ecole de Commerce Solvay, reconstituant ainsi le binôme médecin-gestionnaire que son père portait en lui.
En 2007, Pierre Ryckaert (1955), beau-fils de Raoul Titeca, prend le relais de la Direction Médicale jusqu’en 2017, et la Présidence du Conseil d’Administration depuis 2015 ; neurologue de formation, il a donné un nouvel élan au pôle « Consultations », y intégrant notamment les paramédicaux.
En 2018, Benoît Fleischman (1970) reprend la Direction Générale Médicale de la Clinique Sans Souci, où il exerce depuis 2001, conjointement avec sa fonction de Directeur du Service de Santé Mentale Le Norois, situé à proximité à Laeken. Homme de terrain, il a en charge de conduire la politique médicale de la Clinique Sans Souci dans son intégration au sein du Réseau Norwest et dans la perspective de la réforme, dite « Projet Psy107 », des soins en santé mentale dans la Région bruxelloise.
Le futur, c’est, s’il le veut et le mérite, Antoine Ryckaert (1992), fils de Pierre Ryckaert et petit-fils de Raoul Titeca, qui aura charge de l’avenir de Sans Souci.
La roue tourne…
(Contribution rédigée par Raoul Titeca)